mardi 30 octobre 2012

Apprends-moi ça

J'ai une boule au ventre parce que je suis incapable de changement. L'herbe est plus verte ailleurs mais je me suis toujours contentée de mon herbe. Je m'attache à des petites choses qui me maintiennent dans un état de stabilité. Je ne quitte jamais rien, ni personne sans sécurité assurée d'avoir autre chose ou une autre personne. J'assume bon gré, mal gré les désavantages d'une situation de peur de me retrouver déstabilisée dans une situation inconnue. Le moindre changement me renvoi à un no man's land terrifiant où je manque d'air où j'ai peur de ne plus exister.
Et toi tu vas aller à l'école et c'est moi qui angoisse du changement.
Parce que je sais ce qu'il implique pour moi.
Et comme une mère qui met une veste à son enfant parce qu'elle a froid, je suis en train de te projeter ma peur du vide.
Est-ce si naturel de changer d'école, de vie, de repères? Est-il possible de prendre ses marques à chaque changement?
Pour toi sans doutes, que oui. Tu n'as pas quitté New-York, tu n'as pas quitté Susie, tu n'as pas quitté un monde qui aime les enfants, tu n'as pas du réaprendre les codes sociaux, tu n'as pas du apprendre une langue que tu n'aimais pas, tu n'as pas du te rendre compte qu'on t'avais menti et que tu ne reverrai plus jamais tes institutrices, tes amis, ta vie telle qu'elle était, tu n'as jamais eu peur d'oublier le goût du lait, l'odeur de l'hivers, les yeux de Susie. Et parce qu n'as jamais du te battre seul pour essayer d'aimer ce pays qui est désormais le tien, que tu n'as jamais du faire face aux moqueries des autres enfants parce que tu es différent, tu n'as jamais du te remettre à ta place d'enfant-merde parce que tu n'es qu'un enfant justement et que tu n'as jamais du voir ton père partir et ta mère si triste, tu n'aura jamais peur de cet instant de flottement où tu laches le trapèze pour attraper un autre en plein vol. Le changement sera pour toi, juste une étape difficile à passer et pas ce monstre terrifiant que j'ai bien souvent du mal à combattre.
Dans quelques mois tu ira à l'école et la vie continue, il n'y a rien de grave, juste des nouveaux amis, de nouveaux repères et de nouveaux sourrires.
Vas-y maïn fils, apprends-moi ça...

lundi 15 octobre 2012

Le Smoutch pour les nuls

D'accord, tu n'es plus juste une machine à faire caca.
Une vraie machine complexe qui pense, qui décide, qui dit oui et qui dit non et accessoirement qui fait caca.
Maintenant, je cherche désespérément Le Smoutch pour les nuls, parce qu'il faut avoir fait au moins bac plus six pour arriver à te comprendre. Ton système lingual se perfectionne et mon neurone maternel bug de plus en plus, j'ai peur qu'il n'ai atteint ses limites. Autre chose que mama papa pipi caca, dépasse largement mes compétances. Des phrases tels que ou il est papa? ah il est là! alors que je ne vois que la malheureuse Lola passer dans la pièce, risquent à la longue de m'atteindre mentalement, psychologiquement et nerveusement. Figures-toi, Boubou, que je cherche papa aussi. Et j'en arrive à me demander si Lola n'a pas mangé papa ou que papa se déguise en Lola. Peut-être?
Mais attends, on arrive bientôt au paroxysme de l'horreur avec ce genre d'affirmations Elle est là maman, en haut alors qu'il me semblais, jusque là, que j'étais bien en bas avec toi. Surement, me diras-tu que la vérité est ailleurs -et tu en es capable- cependant, je cherche toujours si Lola n'aurait pas mangé papa pendant que l'autre maman -celle en haut- fait des chapeaux.
Et là où tu finis de m'achever, c'est avec la phrase qui tue, maman assis caca Lola. Je me lèves en un bond, vérifies mes fesses, juste au cas où pour la première fois, la vérité n'est pas ailleurs. Et, rien! Ouf, entre-nous.

Bien j'attendrai que Lola ait fini de digérer papa, que maman redescende d'en haut, afin que l'on puisse tous ensemble débattre de ce que tu as bien pu vouloir dire...

vendredi 12 octobre 2012

Je suis un homme comme maman

Je mets du crayon

Ossi!

Je te mets du crayon

Je mets de l'eyeliner

Ossi!

Je te mets de l'eyeliner

Je mets de l'anticerne

Ossi!

Je te mets de l'anticerne

Je mets du blush

Ossi!

Je te mets du blush

Et puis j'ai fini et je ferme l'armoire

Encore!

Non Sam, c'est fini, on a fini de se maquiller toi et moi.

Tu pleures, tu dramatises, tu hurles à la mort en montrant mes affaires de maquillage et moi je me demande si je ne devrais pas commencer à me raser la barbe, juste pour ton équilibre!?

Mais c'est avec les cils bien noirs, la peau du visage bien unifié et les pomettes légèrement relevées de couleur que tu arrives fièrement à la crèche. Alors, soit!

lundi 8 octobre 2012

Le cycle de la vie

Ta grand-mère m'avait dit j'espère que tes enfants te feront tourner en bourrique comme tu me fais tourner en bourrique. Et je disais d'abord j'aurai même pas d'enfants.

Bon, soit, perdu, j'ai eu un enfant. Et bon soit, encore, oui, tu me fais tourner en bourrique.

Là tu vois, ta grand-mère fait la jigue de nananinanère.

Donc boubou, je crois qu'elle et toi avez mis au point un plan d'attaque, parce que ça sent trop la vangeance:
cette espèce de capacité de foutre un salon sans dessus-dessous en même pas cinq secondes, ça c'est du moi petite!
Le jeté d'assiette, ça c'est du moi petite!
Le mama mama mama mama mama mama mama mama mama mama à toute heure du jour et de la nuit, ça c'est du moi petite!

Alors, vous deux, ça suffit, stop! C'est bon j'ai compris, je transmets le message à moi petite!

Cordialement!

jeudi 4 octobre 2012

Prêt?

Es-tu prêt pour ta deuxième séance d'étouffade de bisous de vingt heures quarante?

On a chanté ce matin dans la salle-de-bain. Happy birthday to you. On t'a, je crois, limite effrayé.
On t'a fait partir à la crèche avec ton petit montage de cakes aux bonbons surprise.
On a hâte de t'offrir ton premier petit vélo et qu'on aille ensemble au restaurant.
Je pense à toi et je me souviens à cette heure-ci, le docteur a dit qu'on allait provoquer les contractions, le liquide qui coulait, la machine qui faisait bip bip, la douleur trop intense, la péri, oh plus la péri, la kiné, tètè, le docteur, ton père, moi toute blanche et hop hop hop vingt heures quarante et ton premier cri.
Je te découvrais, il y deux ans, je t'aimais il y a un an, je t'aime puissance au carré aujourd'hui et l'année prochaine, je t'aimerai puissance au cube.